Le travail sur soi

Relation d'aide

La peur de ce que nous ignorons et le manque de conscience et d’accueil de nos blessures et de nos fonctionnements relationnels nous font choisir toujours les mêmes chemins, nous comporter toujours de la même manière et répéter toujours les mêmes mécanismes de défense. Pourtant, nous sommes enlisé dans des systèmes qui nous font souffrir parce que quelque chose n’est pas juste dans notre manière d’être en relation avec nous-même, avec les autres et avec le monde. Une remise en question s’impose. Notre être profond réclame des changements de perspective et de direction.

Quand notre vie relationnelle se déroule mal et qu’elle se détériore au lieu de s’améliorer, cela signifie qu’il y a quelque chose à changer. La répétition des comportements habituels ne procure aucun soulagement. Elle favorise l’enlisement dans les ténèbres de la stagnation plutôt que d’ouvrir une fenêtre sur la lumière de l’évolution.

L’un des changements les plus efficaces, les plus pertinents et les plus importants pour fertiliser notre vie relationnelle est d’orienter le regard que nous portons sur les autres vers notre vérité profonde afin de consentir plus d’intérêt et d’amour à notre enfant intérieur blessé. En fait, quand une personne aimée réveille nos blessures, nous dirigeons généralement nos pensées et notre attention vers elle plutôt que de rester présent à notre souffrance. Nous tentons alors de la changer pour qu’elle ne déclenche plus la détresse et l’angoisse dans notre cœur.

Cependant, si, au lieu de dépenser notre énergie à attribuer inlassablement au monde extérieur les causes de nos problèmes et de nos souffrances, nous nous concentrons sur notre cœur meurtri, nous pourrons donner à notre enfant intérieur l’amour qu’il n’a jamais eu pour s’épanouir librement. Nous prendrons conscience ainsi que nos fontaines de santé et de ­mieux-être jaillissent au centre même de nos lésions intérieures. Quand nous aurons compris et accompli ce renversement, notre vie personnelle et relationnelle se transformera. Le retour vers soi grâce auquel se dénouent progressivement nos systèmes relationnels est nécessaire pour rétablir la santé de nos relations affectives. Il se réalise par les moyens suivants : 

1. la prise de conscience de nos fonctionnements
2. l’acceptation de notre vulnérabilité
3. la reconnaissance de notre responsabilité
4. l’identification de nos besoins
5. le développement de l’amour de soi

Dans cet article, nous nous étendrons sur la première étape, la prise de conscience de nos fonctionnements.

Aucune métamorphose favorable n’est possible dans les domaines personnel et relationnel sans prise de conscience d’un dysfonctionnement et des malaises qui l’accompagnent. La prise de conscience constitue la première étape de tout processus de changement. Ce processus, que j’ai évoqué dans mon livre ­Relation d’aide et amour de soi, ne peut se concrétiser, sur les plans personnel et relationnel, sans perception claire de nos émotions, de nos modes réactionnels, de nos besoins et des fonctionnements relationnels qui en découlent. Nous ne pouvons transformer ce que nous ignorons de ­nous-même et de ce qui nous habite. Sans cette connaissance de soi encouragée par ­Socrate il y a environ 2500 ans par son « ­Connaîs-toi ­toi-même », nous agissons comme des automates à la merci de nos impulsions et des autres.

C’est incontestablement la conscience de ce que nous sommes qui sert de base à l’évolution de toutes nos dimensions, à l’évolution de nos relations affectives et, par extension, à l’évolution du monde.

Plus s’agrandit notre champ d’ouverture sur ­nous-même, plus notre vision du monde s’élargit et plus notre connaissance de ce qui est s’approfondit. Sans être suivie d’un cheminement pratique, cette lapalissade se limiterait à un savoir abstrait et plus ou moins oiseux. Connaître les éléments qui favorisent la prise de conscience de soi s’avère essentiel pour permettre l’exploration de notre sphère intérieure, mais ce n’est que la première étape. Cela dit, nous pouvons légitimement nous demander : qu’­est-ce qui incite à la connaissance de soi ?

Les seuls moteurs de nos désirs de libération et de changement sont nos émotions et nos besoins, spécialement quand les premières nous font souffrir et que les seconds ne sont pas satisfaits. Naturellement, en tant qu’être humain, nous recherchons le ­bien-être. Quand notre tranquillité intérieure est menacée, nous tentons de la préserver coûte que coûte. Nous ne voulons évidemment pas être malheureux. Cependant, pour nous affranchir de la souffrance, deux voies s’offrent à nous en permanence, l’une inconsciente et l’autre, consciente.

Tous, nous nous laissons happer en premier lieu par la voie de l’inconscience parce que notre première réaction à la douleur en relation est instantanée et défensive. En effet, chaque fois que nous sommes blessé, nous nous défendons automatiquement et inconsciemment, soit par le refoulement, soit par l’attaque projective. C’est un réflexe naturel et tout à fait normal. Toutefois, si nous ne prenons pas conscience de nos mécanismes de défense et des blessures qui les provoquent, et que nous ne leur accordons pas une attention et une écoute particulières, nous nous comporterons inéluctablement toujours de la même manière défensive et affligeante. Soit nous nous autopunirons et nous nous autodétruirons en ­nourrissant des pensées toxiques, en nous gavant de substances dommageables et dangereuses pour la santé ou en attaquant les autres, soit nous choisirons la deuxième voie, celle de la prise de conscience de nos malaises et de nos réactions défensives. Rester dans l’inconscience affecte exponentiellement, à plus ou moins long terme, notre corps, notre cœur, nos relations affectives et anéantit les espoirs de paix en nous et dans le monde. Seule la pleine conscience, dont parle ­Christophe ­André dans son ouvrage ­Méditer, jour après jour, nous sort de nos sentiers battus parce qu’elle porte une promesse de délivrance et de transformation.

La prise de conscience sans jugement de vos fonctionnements de victime, de bourreau, de sauveur, de manipulateur, de juge ou de ­coupable, etc. et, surtout, la prise de ­conscience des blessures, des mécanismes de défense et des besoins non assouvis à l’origine de ces fonctionnements servent de points de départ indispensables au ­changement que vous souhaitez apporter dans vos vies pour vous dégager de vos systèmes relationnels éprouvants et douloureux.

Le souhait de grandir intérieurement et d’entretenir des relations affectives harmonieuses peut servir de tonique puissant et de réelle motivation pour favoriser la prise de conscience qui aiguille le regard et le cœur sur le chemin de tous les possibles. Si nous travaillons sur nous avec un désir sincère d’implication, nous serons guidé vers des espaces intérieurs inconnus, qui recèlent d’inestimables trésors et des potentiels insoupçonnés.

Dès que nous avons mis le pied sur la voie de la prise de conscience de soi, notre vraie nature commence à se manifester, et l’aimant de l’authenticité nous entraîne toujours plus loin au fond de notre être. Nous avons alors envie de traverser tous les épisodes du voyage menant au cœur de soi.

COLETTE PORTELANCE
TRA, Thérapeute en relation d'aide par l'ANDC
Fondatrice du Centre de relation d'aide de Montréal (CRAM)
www.cramformation.comFacebook : CRAM.EIF
Extrait du livre De quel système relationnel êtes-vous prisonnier ?, Éditions du CRAM, 2015, pp.279-283.

Par Colette Portelance

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