Geneviève Everell « j'ai toujours fait confiance à la vie »

Entrevue

Depuis toujours, Geneviève Everell voit dans chaque défi que la vie lui envoie une occasion de plus pour apprendre à mieux rebondir. Celle qui, depuis plus d’une décennie, mène l’entreprise Sushi à la maison de main de maître a dû, au courant des derniers mois, se rappeler d’où elle venait pour nourrir la force et la détermination qui lui permettent d’avancer malgré les obstacles. Rencontre avec celle qui sourit même quand le temps est gris.

Si on avait dit un jour à la chef propriétaire qui compte plusieurs dizaines de « Miss Sushi » à domicile qu’elle n’aurait plus le droit d’entrer chez les gens pour leur offrir ses bouchées de bonheur, elle ne nous aurait pas crus. Pour Geneviève, son entreprise était intouchable. « Le concept de Sushi à la maison est d’offrir à mes clients un repas entre amis ou en famille, dans le confort de leur foyer. Comment allais-je survivre à cette nouvelle réalité ? Mon questionnement fut de courte durée : il fallait rebondir. J’ai la chance d’avoir deux comptoirs de sushis pour emporter. Ce qui était une source de revenus secondaires est devenu ma bouée de sauvetage. Je me suis rendu compte à quel point j’avais sous-estimé ce qui m’a permis de maintenir mon entreprise à flot. Ça remet les choses en perspective. »

Le goût du bonheur
Malgré une enfance difficile et bien des embûches, la petite Geneviève demeure optimiste. Comme si une voix lui disait qu’elle parviendrait à goûter au bonheur. « Je suis complètement responsable de tout ce qui m’arrive. Je n’ai jamais eu peur de rêver grand, mais, surtout, j’ai toujours fait confiance à la vie. Vous me croyiez naïve ? Peut-être, mais je vous jure que ça marche. À chaque demande, je reçois davantage. Je crois vraiment que je suis née, malgré tout, sous une bonne étoile. Quand je demande, je reçois… parfois, dans l’heure qui suit, c’est presque épeurant ! » Geneviève inspire les autres, malgré elle. Celle qui se considère comme imparfaite s’efforce d’être indulgente envers elle-même. « C’est important d’être bon pour soi, car, automatiquement, on le devient pour les autres. J’ai manqué de beaucoup de choses essentielles dans ma vie, mais, malgré cela, je suis capable de donner ce que je n’ai pas reçu, car j’ai appris à m’aimer, tout doucement. »

Geneviève Everell

©Photos: ­Marï ­Photographe • ­Maquillage: ­Jean-François ­Casselman-Dupont - Magazine Mieux Etre

La passion des sushis aura mené Geneviève bien plus loin que ce à quoi elle s’était donné le droit de rêver. « Être passionnée m’a donné des ailes. Pour moi, il n’y a jamais rien d’impossible. » Très active sur les réseaux sociaux, Geneviève nourrit généreusement la page de Sushi à la maison, suivie par près de 125 000 abonnés sur Facebook et 80 000 sur Instagram. « Ces chiffres me dépassent, mais me font infiniment plaisir. Les gens qui me suivent savent à quel point je suis un grand livre ouvert, et c’est ce qu’ils aiment de moi. J’assume tout ce que je dis et ce que je fais. Je suis quelqu’un de très spontané dans la vie, alors ces plateformes sont pour moi un véritable terrain de jeu. J’essaie de générer du positif et j’évite les débats de toutes sortes. Mes opinions, je les garde pour mes proches. »

Une nature optimiste et fonceuse
Geneviève se souvient de la première fois où elle s’est mise à faire part de son idée de devenir chef à domicile. Plusieurs ont tenté de lui faire comprendre que ce choix était risqué, et qu’il était peu probable que ça fonctionne. « J’adore faire mentir ceux qui ne croient pas en moi. C’est d’ailleurs devenu un moteur. Me dire que ça ne se fait pas, c’est l’équivalent d’un "Go, t’es capable !". J’aime m’entourer de gens qui n’ont pas froid aux yeux et qui aiment se mettre au défi. J’ai une équipe formidable qui me suit dans toutes mes folies. Avec elle, je suis devenue plus forte et vice-versa. J’aime donner aux autres l’occasion de se dépasser. »

Geneviève a fait preuve de résilience plus d’une fois dans sa vie. Malgré le peu qu’elle a reçu, elle ne s’est jamais apitoyée sur son sort. « Je suis de nature optimiste, et ce, depuis toujours. Je ne me suis jamais vue comme une victime. J’aimerais bien donner la recette magique à toutes ces petites fleurs qui naissent au milieu d’un amas de roches, mais je n’en ai pas. Chaque matin, je me fais un devoir d’avoir le sourire aux lèvres en me disant à quel point je suis chanceuse. »

Cette joie de vivre, Geneviève l’a aussi reconnue chez son fils, Malcolm. « Mon fils est la plus belle surprise qui me soit arrivée.

Ça faisait à peine deux mois que j’étais en couple quand je suis tombée enceinte. Je me rappelle encore la discussion que nous avons eue en apprenant le résultat du test de grossesse. Nous avions tous les deux envie d’être parents. Nous nous sommes fait la promesse d’être les meilleurs humains du monde pour cet enfant, même si nous devions éventuellement nous séparer. Il n’y a pas une journée qui passe sans que je me dise que c’est la meilleure décision de toute ma vie. Quand je le regarde dans les yeux, j’ai de la difficulté à croire que j’ai pu mettre au monde quelqu’un de si fantastique. Peu importe nos croyances, je suis convaincue que Malcolm n’en est pas à sa première vie sur terre. Il a une vieille âme et une sensibilité hors norme. Il comprend des choses qu’un petit garçon de trois ans ne devrait pas saisir. » Parce que, oui, Geneviève cultive une certaine spiritualité qui l’amène à croire qu’il existe une dimension dans laquelle nous sommes bien petits face à l’infini. « Ça me permet de relativiser, autant quand ça va bien que lorsque ça accroche. Je pense que je suis maître de mon destin, mais jusqu’à un certain point. Il faut accepter cette part d’imprévu et l’accueillir comme une occasion de grandir. »

Geneviève porte un regard très lucide sur ce qu’elle appelle ses "imperfections ". « Je suis quelqu’un qui aime apprendre, je ne détiens pas la vérité. Alors, quand quelqu’un que je respecte questionne ma façon de faire, je ne monte pas aux barricades, je l’écoute. Plus jeune, ma plus grande source de réconfort, c’était la télévision. Quand ma mère partait "sur une dérape", elle m’installait devant la télé et je regardais Chambres en ville. Pete et Lola étaient devenus mes gardiens. Je ne mangeais jamais à table. Un jour, on m’a fait prendre conscience que je reproduisais la même chose avec mon fils. Je croyais que c’était la plus belle source de réconfort à offrir à un enfant, mais hélas, c’était loin d’être le cas. Se tromper est complètement normal, il n’y a rien de grave là-dedans. Il faut se servir de ses erreurs pour évoluer, on devient meilleur ainsi. »

Avec ses mille et un projets, Geneviève manque cruellement de temps pour arriver à décrocher complètement. « En fait, mon meilleur exutoire, c’est l’écriture. Ça me permet de sortir le trop-plein d’idées ou de réflexions qui débordent de ma tête. Je tiens même un journal pour Malcolm. Ça me fait tellement de bien. Comme je suis de nature anxieuse, c’est vraiment le meilleur remède que j’ai trouvé pour me maintenir en équilibre. À la maison, j’ai un immense coffre en bois dans lequel je garde précieusement tous mes journaux intimes, pour ne jamais oublier d’où je viens et, surtout, pour me rappeler le chemin parcouru. »

VALÉRIE GUIBBAUD
Journaliste, animatrice et auteure • Facebook : Valerieguibbaudradiotele

Par Valérie Guibbaud

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